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Protection sociale : 2 propositions pour diminuer le reste à charge élevé des assurés

Deux économistes du Conseil d’analyse économique (CAE) proposent de réformer en profondeur le système de protection sociale français. L’idée est de recentrer les remboursements de la Sécu sur les soins essentiels et de laisser les complémentaires santé prendre en charge les frais supplémentaires. Explications.

Deux économistes préconisent de recentrer les remboursements de la Sécurité sociale sur des soins essentiels et de laisser le reste aux mutuelles.

 

Les expressions « trou de la Sécu » ou encore « système de protection sociale à la française », loin d’être élogieuses, sont pourtant entrées dans le langage courant. Pourtant jusqu’ici, aucune réforme d’ampleur n’a été engagée pour restructurer cette vieille dame. Dans une note publiée le 20 janvier 2016, le Conseil d’analyse économique (CAE), rattaché à Matignon mais totalement indépendant, dresse un portrait une nouvelle fois peu flatteur de la protection sociale et formule six recommandations en vue de la réformer.

A l’origine de cette note, deux économistes, Antoine Bozio et Brigitte Dormont. Si leurs propos n’engagent pas le gouvernement, il n’empêche qu’ils sont sans appel : les auteurs évoquent ainsi « le morcellement institutionnel du système de protection sociale » à la « gouvernance éclatée avec de multiples acteurs aux décisions non coordonnées » qui, au final, ne « permet pas de satisfaire les besoins au moindre coût pour la société ».

Concernant la santé, les auteurs relèvent deux problèmes en particulier : la façon dont le risque est couvert et le chevauchement des remboursements des complémentaires santé et du régime de base de la Sécurité sociale.

Le reste à charge trop élevé des ménages

Ce n’est pas un fait nouveau : depuis plusieurs années, la Sécurité sociale a pris le parti de dérembourser certains soins ou médicaments, augmentant de fait le reste à charge des ménages. Ainsi, les dépenses de santé sont remboursées à 78% par la Sécurité sociale et l’Etat, à 13,5% par les complémentaires santé, et à 8,5% par les assurés eux-mêmes. « Pour maîtriser la dépense, l’ajustement est trop souvent passé par une réduction des taux de remboursement, observent Antoine Bozio et Brigitte Dormont. Si cela permet de réduire la dépense publique, contenir la progression des dépenses d’assurance maladie ne permet pas de maîtriser la part des dépenses de santé dans le budget des ménages. » Les auteurs expliquent en effet que le pouvoir d’achat des assurés, loin de progresser, est grevé par leurs dépenses de soins prises en charge par les complémentaires : « C’est toute la dépense remboursable [soins en dehors de la base de remboursement de la Sécu, Ndlr] qu’il faut maîtriser, et non la seule dépense remboursée [prise en charge par la Sécu, Ndlr]. » En d’autres termes, recentrer sur certains soins de premier ordre les remboursements effectués par la Sécu afin de ne pas laisser un reste à charge trop important aux ménages.

Conflit entre Sécurité sociale et mutuelle

« Le second problème tient à la mauvaise coordination des régimes de base et complémentaires au sein d’un même risque », notent les économistes. Autrement dit, les remboursements réalisés par les mutuelles santé individuelles ou collectives empiètent sur ceux effectués par le régime de base de la Sécurité sociale. Pour Antoine Bozio et Brigitte Dormont, la prise en charge des mutuelles santé doit rester concentrée sur les soins dits « supplémentaires » non prioritaires, comme la médecine alternative, le confort à l’hopital, les dépassements d’honoraires etc., au lieu de participer au remboursement de soins déjà pris en partie en charge par la Sécu. « Le fait que des assurances facultatives interviennent de façon importante pour compléter la couverture des soins de base est une originalité française », constatent les deux économistes.

Autre problème : comme le reste à charge est élevé, la quasi-totalité des Français ont souscrit une complémentaire santé, or cette « situation crée une confusion dans les débats publics sur l’étendue de la couverture ». Les auteurs ont ainsi évalué le reste à charge mesuré avant l’intervention de la complémentaire mais après le remboursement de la Sécu. Et le constat est frappant : « Pour le centile le plus haut en termes de consommation de soins [assurés qui ont de grosses dépenses de santé, Ndlr], ce reste à charge moyen est proche de 5.000 euros sur une année. Un tel résultat suggère que la Sécurité sociale ne protège pas suffisamment contre les dépenses « catastrophiques ». » Présenté plus simplement, comme les mutuelles santé prennent le relai en terme de couverture, la Sécurité sociale a tendance à baisser le niveau de ses propres remboursements, créant un nivellement par le bas de la prise en charge des dépenses de santé défavorable aux premiers concernés.

Deux propositions concrètes

En lieu et place de diminuer la prise en charge des soins par la Sécu, les économistes proposent de créer un panier de soins solidaire, recentré sur les soins essentiels, « qui doivent être accessibles à tous sans barrière financière ». Les organismes complémentaires pourraient ainsi se concentrer sur le remboursement des soins en dehors de ce panier, sans empiéter sur la Sécu. Quant au problème des restes à charges élevés, ces derniers seraient plafonnés : au-delà d’un certain montant de dépenses annuelles calquées sur le panier de soins solidaire, la Sécurité sociale prendrait à sa charge cette somme à 100%.


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Santé : le reste à charge des ménages diminue

Entre réduction de la consommation de soins et de biens médicaux non remboursés et dynamisme des frais totalement couverts par l’assurance maladie, le reste à charge des ménages dans les dépenses de santé est en baisse sur l’année 2013.

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Les Français payent de leur poche une part de moins en moins importante de leurs dépenses de santé. Selon l’étude sur « Les comptes nationaux de la santé en 2013 » réalisée par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), le reste à charge des ménages s’établit à 8,8% en 2013, en baisse de 0,2 point par rapport à l’année précédente. Le reste à charge des ménages est la partie d’une dépense de santé qui n’est ni remboursée par la sécurité sociale ni par la complémentaire santé. Elle pèse donc directement sur les finances du particulier. La consommation de soins et biens médicaux (CSBM) est évaluée à 186,7 milliards d’euros pour l’année 2013, soit 2 843 euros par habitant. Le reste à charge des Français s’élève donc en moyenne à 250,20 euros.

Pourtant, la part de la CSBM remboursée par les mutuelles est restée stable à 13,8%. La part prise en charge par la sécurité sociale augmente légèrement, de 75,9 à 76% de 2012 à 2013. La part représentée par la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et l’aide médicale d’Etat passe de 1,3 à 1,4%. Si le reste à charge des ménages a pu diminuer sans impacter trop fortement les différents organismes de remboursements, cela résulte donc d’un changement de comportement de la part des utilisateurs en matière de dépenses de santé.

La consommation de médicaments non-remboursables (par conséquent totalement à la charge des particuliers) a baissé de 2% en 2013, « ce qui n’était pas arrivé depuis 2005 », précise l’étude. De plus, les dépassements de tarifs sur certains postes de dépenses tels que les prothèses ou les frais d’optiques sont également en recul. Pour couronner le tout, la croissance des dépassements d’honoraire est de « seulement » 2,8 % en 2013 alors qu’elle était supérieure à 4% de 2006 à 2011.

Parallèlement à ce ralentissement des dépenses non remboursées, les frais de santé intégralement pris en charge par la sécurité sociale connaissent un certain « dynamisme », comme l’avaient remarqué les pouvoirs publics dans une annexe du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Ce dynamisme constitue un des « facteurs structurels de diminution du reste à charge pour les ménages » évoqué par la DRESS dans son étude.

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