Parti des compagnies d’assurances forcées d’unir leurs ressources pour optimiser les charges et atteindre une taille critique, le mouvement de fusion des structures d’assurances a atteint la mutualité et les groupes de protection sociale. Au cœur de ces opérations, les synergies informatiques, qui passent par la définition de plates-formes informatiques cibles homogènes, du front-office (portails) au back-office (systèmes de production), en passant par les couches transversales (CRM, décisionnel, reporting). Grand angle sur un phénomène complexe et coûteux qui vise pourtant à rationaliser les charges, à terme.
La pression des tutelles, Agirc Arrco pour les retraites et Mutualité Française pour le monde des mutuelles, y est pour beaucoup. Tout comme Solvabilité 2. L’une et l’autre apparaissent comme des facteurs poussant au regroupement des structures qui balaie le secteur. Un mouvement amorcé depuis plus de deux décennies. Et qui se traduit par la constitution de mastodontes, de véritables poids lourds de gestion soucieux d’harmoniser leurs processus et leurs outils en vue d’engranger des économies d’échelle et d’imposer leur loi sur le marché.
L’attraction de certaines plates-formes
Préalable à cette finalité, la nécessité d’opérer des choix-cibles, surtout en termes de moyens, y compris informatiques. Ceux-ci sont souvent déterminants dans ces opérations avant tout politiques. Comme le reconnaît Eric d’Andigné, directeur général de l’éditeur Elcimaï impliqué dans certaines de ces fusions, “les rapprochements et séparations entre mutuelles et groupes de protection sociale s’accélèrent, certes, au gré des calculs politiques. Pour autant, le réalisme technologique joue parfois également un rôle dans ces synergies. L’analyse des composants informatiques en présence est souvent prise en compte comme préalable à ces mariages de raison, une trop grande hétérogénéité des plates-formes étant synonyme de complexité du fait des incompatibilités logicielles, dans certains cas”. Et d’ajouter : “dans d’autres cas, la qualité d’un système d’information cible peut même conférer à son propriétaire un argument de poids pour attirer de nouveaux membres dans son union de mutuelles. Il semble bien que le choix de certaines mutuelles de rejoindre les groupes leaders (Istya, Harmonie Mutuelles, etc). ait été dicté par la volonté de bénéficier d’une plate-forme mutualiste technologique d’excellence”.
Un prix à payer pour que union devienne force
Au-delà de cette analyse, les rapprochements imposent une architecture cible à mettre rapidement en place pour engranger des économies d’échelle. En front-office, il s’agit de déployer, par exemple, un portail unique en lieu et place des différents sites web des composantes historiques du nouveau groupe. Une stratégie qui va jusqu’à l’harmonisation des applications mobiles. Sur la couche applicative transversale, le décisionnel et autre reporting doivent également être harmonisés. Enfin, les applications de production, cœur du système d’information doivent converger vers un système unifié par métier (prévoyance, santé, dommages, assurance vie, etc.). A terme, un seul outil par filière doit persister. Tout comme une architecture matérielle commune. Ce n’est qu’à ce prix que l’union fait la force.
Emmanuel Mayega