– mardi 10 décembre 2013 16:52
Plusieurs dispositions réglementaires risquent de se traduire par une hausse des tarifs des complémentaires santé. Un paradoxe en plein débat sur l’accès des Français aux « mutuelles ».
Alors que le gouvernement est conscient des prix élevés des « mutuelles », certaines mesures législatives pourraient paradoxalement en augmenter le coût. Ainsi, une disposition du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2014, définitivement adopté le 3 décembre 2013, instaure à compter du 1er janvier 2014 un forfait de 5 euros par patient versé aux médecins pour les rétribuer de leur rôle de « coordinateur » du parcours de soin.
Jusqu’ici, rien de grave pour les finances des malades puisque c’est l’Etat qui va payer. Sauf que le gouvernement a demandé aux complémentaires santé de financer la moitié du forfait au motif que les praticiens vont mieux orienter leurs assurés et vont ainsi leur faire réaliser à terme des économies. La mesure est estimée à 150 millions d’euros par an. Un budget qui peut être aisément absorbé par les acteurs de l’assurance santé. Du moins, si l’on en reste là. Or, « rien ne nous dit que le forfait de 5 euros ne sera pas un jour intégralement pris en charge par les complémentaires santé », estime un expert du secteur. « Dans ce cas, le surcoût sera reporté sur l’assuré », ajoute-t-il.
Le coût de la « portabilité »
Une autre mesure, instaurée cette fois-ci par la loi du 14 juin 2013 sur la sécurisation de l’emploi, représente une menace plus sérieuse sur le tarif des mutuelles. Outre la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés au 1er janvier 2016, cette loi qui découle de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 donne la possibilité, à partir du 1er juin 2014, à un ex-salarié au chômage de bénéficier de la complémentaire santé de son ancienne entreprise non pas durant 9 mois comme actuellement mais pendant 12 mois. Surtout, l’ex-employeur devra prendre en charge à 100% la complémentaire du demandeur d’emploi, contre 50% aujourd’hui.
Compte tenu du principe de « mutualisation » cher à l’assurance, les salariés actuels vont donc devoir payer pour les anciens. L’impact de cette « portabilité » élargie des droits à la complémentaire santé devrait se traduire par une hausse limitée des tarifs de l’ordre de 2% à 3%. Mais la note pourrait, dans certains cas, être beaucoup plus salée. Les salariés d’entreprises qui licencient et/ou qui emploient beaucoup de CDD susceptibles de s’inscrire à Pôle Emploi pourraient être pénalisés. « En fonction du secteur d’activité ou de l’organisation de l’entreprise, on peut s’attendre à des hausses tarifaires allant jusqu’à + 8%, voire + 15% », pronostique Pierre-Alain Boscher, directeur métier en protection sociale au cabinet de conseil en actuariat Optimind Winter. Des assureurs auraient déjà proposé à des entreprises d’opérer une première augmentation au 1er janvier 2014 pour que celle qui entrera en vigueur à partir du 1er juin 2014 soit « lissée » et plus facile à faire passer auprès de leurs salariés.
La « mutuelle d’entreprise » en partie fiscalisée
Ces derniers vont, quoi qu’il arrive, voir surenchérir le coût de leur « mutuelle d’entreprise » via leurs… impôts. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2014, dont le vote définitif est prévu le 19 décembre 2013, prévoit en effet, la « fiscalisation » de la contribution des employeurs à la complémentaire santé. Jusqu’ici exonérée d’impôts, cette contribution qui représente en moyenne 60% du prix de la complémentaire sera intégrée dans les revenus à déclarer à partir de la déclaration 2014 (sur les revenus 2013). Cela aurait pu être pire : le gouvernement a été tenté à un moment de fiscaliser également la contribution payée par le salarié….
A lire aussi :
Assurances santé : les tarifs augmentent aussi sur Internet